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Contemplations très-pieuses sur le crucifix, et les pleurs de la vierge mère au pied de la croix.

Author(s), creator(s), collaborator(s) : Soto, Andrés de; La Bruyère, Mathias de
Type of the represented object : Book

Détails
Author(s), creator(s), collaborator(s): Soto, Andrés de (1553?-1625) (author)
La Bruyère, Mathias de (translator)
Editor: [Ath] : A Ath, chez Jean Maes
Place of creation of the original object: Belgique - Ath
First publication of the original object: 1610
17th century
Modern times (1492-1789)
Original object location: Réseau des Bibliothèques
Identifiant(s): R4462A (cote ULiège)
700400565 (code-barres ULiège)
Abstract: Composées par le révérend père frère André de Soto, de l'ordre de S. François, confesseur de la séréniss.[ime] infante, madame Isabelle Claire Eugénie, princesse souveraine des estatz de Flandres ; traduictes d'espagnol en françois par M. de la Bruière, cy devant lieutenant de la prevosté de Paris, avec l'opuscule qui ensuit composé par ledict de la Bruière.
Material, support of the original object: Papier
Dimensions, weight or duration: 16 cm
Physical description of the represented object : 8 feuillets non numérotés, 135 feuillets, 13 feuillets non numérotés
Description: Traduit de: Espagnol
Porte la mention : "Avec privilège pour six ans"

Signatures : *⁸ A-S⁸ **⁴
Empreinte: s&n- ire& uxct enme (3) 1610 (A) (exemplaire ULiège)
CREF classification(s): Théologie
Classification(s): Arts & humanities => Religion & theology
Organization that sponsored the digitization: Université de Liège - ULiège
Part of: Public domain
Permalink: https://hdl.handle.net/2268.1/3495

pdf.png
R4462A.pdf
Description:
Size: 42.54 MB
Format: Adobe PDF
Access type: Open Access
Scientific presentation

La ville d’Ath, à l’époque moderne, ne fut pas un centre d’imprimerie très productif, encore moins dynamique. La plupart des éditions produites là-bas avaient un caractère très local. L’ouvrage présenté ici occupe, cependant, une place toute particulière. Bien qu’il s’agisse d’un des premiers livres imprimés à Ath, cette édition est peu connue. Son imprimeur Jean Maes, proto-typographe de la ville, est le fils d’un imprimeur du même nom de Louvain (Masius). Il s’était installé dans la ville hainuyère pour y ouvrir une librairie aux alentours de 1590. Il assumait également les charges d’huissier de la chambre échevinale et de crieur public avant de devenir imprimeur en 1610 grâce à une subvention reçue des échevins de la ville.

L’imprimeur d’origine louvaniste ne tarda pas à se mettre au travail. Ainsi, deux éditions portent l’année 1610 sur leur page de titre. La première est une impression de la Description de la ville d’Ath, rédigée par le bourgmestre de la ville, Jean Zuallaert, à l’occasion de la visite de Jean-Baptiste Gramaye, chargé lui-même de faire une description de la ville d’Ath par les archiducs Albert et Isabelle; soulignant la proximité de Maes avec l’administration communale. La deuxième publication, de genre dévotionnel, est intitulée Confessions pieuses sur le Crucifix et est l’œuvre du confesseur personnel de l’archiduchesse Isabelle, Andrés de Soto (1553-1625). Ce père franciscain récollet d’origine espagnole fut un écrivain fécond. Il publia une vingtaine d’ouvrages à partir des années 1590, pour la plupart imprimés à Bruxelles ou Anvers. Toutefois, cette publication athoise pose question : comment expliquer la décision prise par Maes d’imprimer ce livre ? D’autant qu’avec presque trois cents pages, les Confessions pieuses s’avèrent comme l’une des éditions les plus considérables de cet imprimeur, habitué aux travaux occasionnels et aux impressions pour les échevins ou le collège athois.

Regardons le livre de plus près. L’auteur divise son texte en neuf chapitres, tous consacrés à la crucifixion de Jésus-Christ. Le troisième chapitre, par exemple, explique pourquoi le Seigneur « a choisy la mort de la Croix, & non un aultre genre de mort », tandis que d’autres approfondissent la question de la « forme et figure de la Croix » ou la couronne d’épines. En général, le récollet espagnol souligne l’importance de la contemplation de la passion du Seigneur et, par extension, du crucifix. Il s’adresse en premier lieu à sa pénitente, l’archiduchesse Isabelle, à qui il dédie le livre. De Soto conçoit la royauté comme un appel à l’imitation du Christ, raison pour laquelle Isabelle – si elle vise un gouvernement juste – est supposée contempler elle aussi le crucifix. La publication du livre souligne la volonté de l’auteur d’atteindre un public plus large, au-delà de la cour de Bruxelles. De Soto participe au mouvement de renforcement de la dévotion christocentrique, si caractéristique du catholicisme de l’époque moderne. Quantité de livres avec un sujet similaire parurent au début du dix-septième siècle dans les Pays-Bas espagnols.

Notons que l’édition athoise n’est pas neuve. L’édition princeps, rédigée en espagnol, parut en 1601 à Anvers. Comme le précise la page du titre, l’impression de Maes est une traduction française composée par Matthias de La Bruyère (ou Delabruyère), « cy devant Lieutenant de la Prévosté de Paris ». La Bruyère fait partie du groupe dit des « ligueurs de l’exil », composé d’anciens chefs de la Ligue catholique en France qui se sont enfuis dans les territoires du roi d’Espagne après la chute de Paris en 1594. La plupart d’eux regagneront la patrie après quelques années seulement. Mais tout comme Jean Boucher, théologien de la Sorbonne devenu chanoine de Tournai, La Bruyère s’est tellement compromis et persista si obstinément dans ses convictions jugées dangereuses, qu’il demeurera persona non grata dans le royaume d’Henri IV. Si l’ancien fonctionnaire parisien assuma un rôle de médiateur entre les exilés et les autorités habsbourgeoises dès son arrivée, il semble toutefois qu’il tomba en disgrâce en 1602. Il est envoyé à Naples contre son gré, où il n’arrivera qu’en 1607, après maintes manœuvres dilatoires. On ignore s’il s’y trouvait toujours au temps de la traduction du livre.

La Bruyère ne s’est pas limité à une simple traduction. Il a ajouté une épître dédicatoire à l’auteur, longue de seize pages, malheureusement sans date. Inutile de proposer une analyse complète de cette épître, mais quelques éléments méritent d’être signalés. On y apprend ainsi que De Soto aurait lui-même requis l’aide de l’ancien ligueur pour la traduction (R8 v°). La Bruyère continue son exposé avec une longue argumentation sur l’éducation et les qualités d’un bon monarque, qu’il ponctue d’un grand nombre de références aux autorités antiques et patristiques ainsi qu’à l’Ancien Testament. Le traducteur se range bien évidemment au côté du franciscain espagnol, mais on sent tout de même poindre ses antécédents de ligueur parisien, qui luttait précisément pour la préservation d’une vraie monarchie chrétienne, contre l’accession du huguenot Henri de Bourbon. Ce penchant explique sa fascination pour le thème de la monarchie, qui s’éloigne un peu de l’intention primale de De Soto, de montrer comment la contemplation du crucifix guide vers un gouvernement juste. Finalement, La Bruyère n’oublie pas de louer les archiducs « qui entre tous les Princes de la terre luisent d’une ancienne & auguste splendeur, & comme le Soleil par tout le monde estendent leur lumiere & iectent par effect leurs rayons d’exemplaire vertu par tout la Chrestienté » (S2 v°– S3 r°). Il s’agit sans doute d’une tentative de sa part de rentrer en grâce et pouvoir revenir dans les Pays-Bas espagnols.

À la fin de son épître, La Bruyère écrit « qu’il a pleu a Dieu me donner en la contemplation du mesme subiect, et par une recollection de certains poincts par moy extraicts d’aucuns notables auteurs, i’ay conceu et imaginé en mon esprit la forme et matiere de laquelle […] il ma semblé devoir estre tissue et composee la vraye Couronne du Prince en ce monde » (S7 r°). Il a donc décidé d’ajouter au livre du confesseur franciscain un ouvrage qu’il vient d’écrire et qu’il a intitulé De la Couronne du Prince, ouvrage qu’il trouve « convenable de le ioindre immediatement a sa racine & cause premiere » (S7 v°). Il propose d'imprimer le tout dans une nouvelle édition. Aucune trace de ce texte n’a été retrouvée. L’impression n’a probablement pas dû voir le jour. Quoi qu’il en soit, cette intention confirme l’attachement obstiné à la pensée de la Ligue et l’obsession de La Bruyère envers la royauté et la monarchie.

Reste la question de la parution de cette traduction chez Jean Maes à Ath, alors que ni De Soto, ni La Bruyère ne semblent avoir entretenu des relations étroites avec lui. La réponse se trouve peut-être dans l’engagement des franciscains récollets d’Ath. Dans les feuilles liminaires du livre, on trouve en effet un éloge au franciscain espagnol écrit par Lambert Mirwart, frère mineur d’Ath (**4 r°). En plus, le livre reçut l’approbation ecclésiastique de Petrus Carpin, frère du même ordre et lecteur de théologie, agissant « ex mandato speciali Reverendi Domini Vicarii Generalis Cameracensis » (** v°). On peut ainsi envisager que l’auteur ait cherché l’assistance de ses confrères pour la publication de cette traduction et que ceux-ci ont approché Jean Maes, qui venait d’ouvrir un atelier d’imprimerie à Ath. Dans les années qui suivirent, Maes imprimera d’ailleurs deux autres éditions écrites par des franciscains ou liée aux activités de leur ordre, dont une reçoit également l’approbation de Carpin.


Alexander Soetaert
Leibniz-Institut für Europäische Geschichte, Mayence
Katholieke Universiteit Leuven


Cette présentation a été réalisée dans le cadre de la collection "Arm@rium Universitatis Leodiensis. La bibliothèque virtuelle du Moyen Âge et de la première Modernité de l’Université de Liège", développée par l'Unité de Recherche Transitions .


Citer cette présentation :
Soetaert A., « Andrés De Soto, Contemplations très-pieuses sur le crucifix, et les pleurs de la vierge mère au pied de la croix, Ath, Jean Maes, 1610, 8° (Liège, Bibliothèques ULiège, R4462A) », in Arm@rium Universitatis Leodiensis. La bibliothèque virtuelle du Moyen Âge et de la première Modernité de l’Université de Liège, avril 2019. http://hdl.handle.net/2268.1/3495
Bibliographie :

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