Présentation scientifique

La Concio de immensa Dei misericordia paraît pour la première fois en septembre 1524. Elle sort des presses de l’imprimeur attitré d’Érasme, Johann Froben, accompagnée d’une version élargie d’un autre texte de l’humaniste, la Virginis et martyris comparatio. La rédaction de cet ouvrage répond à une demande de l’évêque de Bâle, Christoph von Utenheim, avec qui Érasme entretenait des liens cordiaux et qui venait de consacrer une chapelle à la divine miséricorde. Si elle se présente comme un sermon, la Concio de immensa Dei misericordia est bien trop longue pour avoir été prononcée à l’occasion de cette célébration.

Ce texte constitue une méditation sur l’un des thèmes majeurs du christianisme, celui de la miséricorde divine, par laquelle Dieu offre aux êtres humains, sans exception, le salut éternel. Même si sa structure ne respecte pas rigoureusement les règles établies de la rhétorique classique, elle correspond néanmoins au style et à la forme d’un bon sermon, tels que les définit Érasme dans son Ecclesiastes. L’humaniste déploie dans son ouvrage un éloge de la miséricorde divine, qu'il identifie comme le fondement du salut éternel universel. Il exhorte avec une douceur persuasive à l'adoption de l'humilité, de l'espérance, de l'adoration et de la repentance, qu'il considère comme des prérequis essentiels à l'obtention de ce salut.

La Concio s’inscrit pleinement dans les débats doctrinaux de son temps. Elle fut publiée le même mois qu’un autre texte polémique d’Érasme dirigé contre Luther, le De libero arbitrio. Bien que la Concio ne cite pas explicitement le nom du réformateur, elle cible en revanche sa doctrine de la justification. Cet ouvrage fonctionne ainsi comme une sorte de complément au traité sur le libre arbitre. Luther n’apprécia guère les deux textes. Avec le temps, la Concio suscita également la méfiance des autorités catholiques garantes de l'orthodoxie. Les inquisiteurs romains, en particulier, jugèrent ce sermon sur la miséricorde suffisamment délicat pour l'inclure dans la liste des ouvrages dangereux. Trois passages furent même formellement interdits et repris dans l'Index expurgatorius.

La corrélation entre la Concio et le De libero arbitrio n’aura pas échappé à un lecteur du XVIIIe siècle qui réunit les deux exemplaires aujourd’hui conservés à l’Université de Liège sous une reliure de basane marbrée.