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A la découverte de femmes de lettres et de sciences en Belgique : portraits de quelques pionnières

9 Mar 2023

DONum vous emmène à la découverte de personnalités féminines qui ont marqué l’histoire littéraire et scientifique, parfois politique, en Belgique.

Ce parcours n’est pas exhaustif : il est le reflet des collections imprimées conservées au sein de ULiège Library et donc des œuvres qui ont été intégrées aux collections de l’Université de Liège, à un moment donné, parce qu’elles étaient pertinentes dans le cadre de la recherche ou de l’enseignement menés à l’Université.

La variété de leurs parcours témoigne d'un 19e siècle qui ouvre très progressivement (ou très lentement) la porte aux femmes dans des domaines pourtant essentiels, comme l'enseignement secondaire et universitaire, la recherche et la publication scientifiques. Certaines sont autodidactes, d'autres ont bénéficié de ces premières ouvertures, avec un parcours scolaire et universitaire. Pour plusieurs d'entre elles, ce cotoiement du monde scientifique ne dure qu'un temps : après une formation universitaire et quelques publications, elles quittent l'environnement universitaire et se consacrent à des activités plus traditionnelles ou attendues pour l'époque. D'autres ont poursuivi leurs activités scientifiques ou littéraires bien au-delà de leur formation. Pour certaines, ce sera avec l'appui et la collaboration de leur époux ; pour d'autres, ce sera de façon plus autonome. Plusieurs d'entre elles ont été actives dans le mouvement féministe ou dans certains mouvements sociaux, par le biais de leurs publications ou de leurs activités.

Femmes de lettres

Caroline Boussart (1808-1891)

Caroline Boussart est journaliste et femme de lettres. Elle fonde en 1837 le Journal de Bruges avec son mari, le cartographe et éditeur Philippe Christian Popp, journal qui se fait le porte-parole du parti libéral. Elle en sera la rédactrice en chef durant une cinquantaine d’années. Parallèlement à son œuvre journalistique, elle publie des récits qui mettent à l’honneur la Flandre occidentale, sous la forme de contes, légendes et nouvelles.

> Retrouvez quelques-unes de ses œuvres sur DONum

Pour en savoir plus : A. Piters, « Popp (Caroline-Clémence Boussart, dame) », in Biographie Nationale, t. 18 (Ponceau-Reinula), Bruxelles, Académie royale de Belgique, 1905, col. 33-38.

Caroline Gravière (1821-1878)

De son vrai nom Estelle Crèvecœur, Caroline Gravière a marqué la vie des lettres belges de langue française durant la seconde moitié du 19e siècle. Elle s’inscrit dans le courant du réalisme littéraire. Comparée régulièrement à Georges Sand, ses romans tentent d’aller à contre-courant des stéréotypes de l’époque. Ses préoccupations quant aux problèmes posés par la condition féminine (dont les questions du travail, de l’éducation et du mariage) transparaissent dans ses œuvres à partir des années 1870. Elle combat également les préjugés sociaux de son époque : préjugés de classe, mépris pour la langue flamande, préjugés moraux ou racistes…

Le roman La Servante, paru en 1871, est l’un de ses premiers textes. > Retrouvez-le sur DONum

Pour en savoir plus : M. Michaux, « Caroline Gravière (1821-1878), bourgeoise insoumise ? », Textyles [En ligne], t. 10 (1993). https://doi.org/10.4000/textyles.1925 (consulté le 3 mars 2023).

Juliette de Robersart (1824-1900)

Epistolière, Juliette de Robersart est peu présente dans les biographies et dictionnaires d’auteurs belges du 19e siècle. Elle est l’auteure d’une correspondance de voyage relatant ses périples Espagne, au Maroc, en Egypte, en Terre sainte et au Liban.

Le Roman de Louis Veuillot, publié en 1936, comprend la correspondance de Juliette de Robersart avec Louis Veuillot, journaliste et homme de lettre français qui l'a encouragée à la publication de ses écrits. Ces lettres font suite à leur rencontre à Rome, en 1862.

> Retrouvez le Roman de Louis Veuillot sur DONum.

Pour en savoir plus : R. Mortier, Une épistolière belge oubliée : Juliette de Robersart [En ligne], Bruxelles, Académie
royale de langue et de littérature françaises de Belgique, 2008. http://www.arllfb.be/ebibliotheque/communications/mortier100201.pdf (consulté le 3 mars 2023).

Maria-Elisabeth Belpaire (1853-1948)

Maria-Elisabeth Belpaire est une figure marquante du « féminisme chrétien » en Flandre. Son œuvre littéraire comprend de la poésie et des contes de fées, dans l’esprit du courant romantique. Elle a publié également nombre d’études sur la littérature romantique ainsi que des récits biographiques et autobiographiques.

Maria-Elisabeth Belpaire a beaucoup œuvré en faveur de l’éducation fémine. En 1897 notamment, elle fonde, avec Hilda Ram, l’Extension universitaire pour les femmesà Anvers, organisée exclusivement pour et par des femmes. Elle fonde le cercle Constance Teichmann en 1910, destiné à apprendre le flamand et la littérature enfantine aux femmes de classe aisée.

Elle a également été active dans le mouvement flamand. Elle est la co-fondatrice du cercle catholique flamingant Eigen Leven en 1898.

Le recueil de nouvelles flamandes Uit het leven, publié en 1887, marque ses débuts littéraires.

> Retrouvez celui-ci ainsi que d'autres de ses oeuvres sur DONum.

Pour en savoir plus: E. Gubin, Dictionnaire des femmes belges : XIXe et XXe siècles, Racine, 2006.

Marguerite Van de Wiele (1857-1941)

Journaliste et romancière, Marguerite Van de Wiele est la première femme de lettres belges à avoir vécu de sa plume. Ses romans dépeignent le portrait de femmes confrontées aux normes imposées par leur milieu. Elle pose la question de l’émancipation féminine dans une société où la vie d’une femme ne peut se construire que par les hommes, dans un modèle familial centré autour d’eux. Elle évoque également la place de l’enfance dans la société ainsi que celle de la sensibilité dans un univers matérialiste. Engagée dans les mouvements féministes belges, elle assurera également les fonctions de présidente de la Section du Livre et de la Presse du Conseil national des femmes belges (1907), puis deviendra ensuite présidente du Conseil lui-même et vice-présidente du Conseil International des Femmes.

> Retrouvez quelques-unes de ses œuvres sur DONum

Pour en savoir plus : P. Van den Dungen, « Marguerite Van de Wiele », in E. Gubin, V. Piette, J. Puissant, S. Dupont-Bouchat, J.-P. Nandrin (dir.), Dictionnaire des femmes belges. XIXe et XXe siècles, Bruxelles, Racine, 2006, p. 554-556 ; V. Gemis, « Femmes et champ littéraire en Belgique francophone (1880-1940) » [En ligne], Sociétés contemporaines, vol. 78, n° 2 (2010). https://doi.org/10.3917/soco.078.0015

Hilda Ram (1858-1901)

De son vrai nom Maria Mathilda Ramboux, Hilda Ram est l’auteure de recueils de poèmes en flamand, qui rencontrent un beau succès dès leur publication.

Au-delà de son activité littéraire, Hilda Ram est active dans le mouvement flamand et le mouvement féministe catholique. Elle crée en 1897, avec Maria-Elisabeth Belpaire, l’Extension universitaire pour femmes, un cours de niveau universitaire accessible aux femmes, à l'Université libre de Bruxelles. En 1899, elles fondent le Cercle Constance Teichmann, promouvant l’utilisation de la langue flamande auprès des femmes de classe aisée. Elle est membre du cercle catholique flamingant Eigen Leven et chevalier de l’ordre de Léopold.

> Retrouvez plusieurs de ses oeuvres littéraires sur DONum

Illustration : Hilda Ram.

Adrienne Jelley-Bruyère (1870-1950)

Régente dans l’enseignement, Adrienne Bruyère a également été romancière et peintre de nature morte. Elle a publié divers romans et contes pour la jeunesse, ainsi que collaboré à différents journées et revues d’art et de pédagogie. Elle écrit sous le pseudonyme de Danièle Vindor.

Retrouvez sur DONum L’écharpe amarante, un court récit publié en 1941 : découvrir son oeuvre.

Illustration : Adrienne Jelley-Bruyère.

 

 

Blanche Rousseau (1875-1949)

Après une formation d’enseignante aux Cours d’éducation pour jeunes filles, à Bruxelles, Blanche Rousseau débute une carrière littéraire en 1895. Ses premiers récits sont publiés dans la rue L’Art jeune. Au cours de sa carrière, elle s’illustre en particulier par la publication de contes pour enfants et récits pour la jeunesse.

Nany à la fenêtre est le premier recueil de contes publié par Blanche Rousseau, en 1897 : retrouvez-le sur DONum.

Pour en savoir plus : V. Gemis, « Socialisation genrée et création littéraire : les récits autobiographiques de Jean Dominique et Blanche Rousseau », COnTEXTES [En ligne], t. 15 (2015). https://doi.org/10.4000/contextes.6023 (consulté le 3 mars 2023).

Femmes de sciences

Marie-Anne Libert (1762-1865)

Botaniste originaire de Malmedy, Marie-Anne Libert s’intéressera particulièrement à la végétation des hautes fagnes, puis aux plantes cryptogames des hautes régions de l’Ardenne. Elle collabore un temps avec le Dr. Lejeune de Verviers, chargé de rédiger un catalogue des plantes du département de l’Ourthe. En 1862, lors de sa création, la Société royale de botanique de Belgique l’inclut parmi ses membres honoraires. Dans les dernières années de sa vie, elle se consacre également à des travaux d’histoire et d’archéologie autour du passé de la principauté de Stavelot-Malmedy.

> Retrouvez sur DONum quelques-uns de ses travaux.

Pour en savoir plus : F. Crépin, « Libert (Marie-Anne) », in Biographie Nationale, t. 12 (Les – Ly), Bruxelles, Académie royale de Belgique, 1893, col. 91-94. Voir aussi la page que lui consacre le Cercle Royal Marie-Anne Libert ASBL.

Elisa Destrée (Bommer) (1832-1910) et Mariette Hannon (Rousseau) (1850-1926)

Botanistes toutes deux, Elisa Destrée et Mariette Rousseau font connaissance en 1873. Rapidement, elles collaborent ensemble à l’étude des champignons de notre pays, délaissée depuis les travaux de Marie-Anne Libert. De 1885 à 1890, elles publient différentes études relatives aux champignons observés aux environs de Bruxelles. Elles étudieront plus tard les spécimens récoltés par l’expédition Belgica.

> Retrouvez leur catalogue sur DONum.

Pour en savoir plus : M. Rousseau, « Nécrologie. Madame J. E. Bommer, née Elisa Destrée », in Bulletin de la Société royale de botanique de Belgique, t. 47, 1910, p. 256-261 ; M. Wodon, « Hannon-Rousseau (Marie – Sophie – Josèphe – Pauline – Jeanne, dite Mariette) », in Biographie nationale, t. 37, 1971, col. 405-410.

Illustration: Mariette Rousseau

 

Józefa Joteyko (1866-1928)

Psychologue, physiologiste et pédagogue polonaise, Joséphine Joteyko a réalisé une partie de ses études à Bruxelles. Elle y revient en 1898, pour travailler sur la physiologie et en pariculier la physiologie du travail, à l’Institut Solvay.

> Retrouvez ici quelques-uns de ses travaux, sur la fatigue et la douleur.

Wéry, Joséphine (1879-1954)

Joséphine Wéry s’inscrit en 1902 à l’Université libre de Bruxelles, où elle décroche, deux ans plus tard, un diplôme en botanique. Elle oriente ensuite sa formation en anatomie végétale, physiologie et paléontologie. Elle publie plusieurs articles dans le cadre de sa formation, dont des rapports d'excursion (au littoral et dans le Brabant), dans la Revue de l’Université de Bruxelles, en 1906. Elle poursuivra ses recherches en botanique par la suite, réalisant notamment des missions scientifiques au Congo avec son époux, Henri Schouteden, zoologiste, ornithologue et entomologiste.

> Retrouvez ici quelques-uns de ses travaux

Pour en savoir plus : https://www.bestor.be/wiki/index.php/W%C3%A9ry_(Schouteden),_Josephine_(1879-1954)

Illustration : Joséphine Wéry

Hélène Antonopoulo (1891-1944)

Sociologue du travail et professeure à l’Université libre de Bruxelles, elle a notamment mené des recherches sur le travail des femmes. Elle est une membre active de la Fédération belge des Femmes universitaires (FBFU) qui milite notamment pour l’instruction des filles, la défense de l’accès des femmes à toutes les professions et la défense du droit au travail pour les femmes.

Retrouvez sur DONum l’un de ses articles relatif au projet de loi belge sur l'organisation des professions et la réglementation économique.

Pour en savoir plus : C. Jacques, « Le féminisme en Belgique de la fin du 19e siècle aux années 1970 » [En ligne], Courrier hebdomadaire du CRISP, vol. 2012-2013, no. 7-8, 2009, pp. 5-54. https://doi.org/10.3917/cris.2012.0005

Femmes engagées

Si plusieurs des personnalités évoquées ci-dessus ont oeuvré activement à la défense des intérêts et droits des femmes, certaines se sont consacrées à ce combat, sans être femmes de lettres ou de sciences. Voici le portrait d'une d'entre elles.

Marthe de Kerchove de Denterghem (Boël) (1877-1956)

Marthe de Kerchove de Denterghem est issue d’une famille de vieille noblesse, engagée politiquement du côté libéral. Elle fonde à La Louvière le Cercle des Dames Libérales. Elle préside, dès 1904, une société de secours mutuels pour des ouvriers et participe en 1912 à la création d’une consultation pour nourrissons, puis à la création d’une mututalité féminine en 1913. Pendant la Première Guerre mondiale, elle travaille comme ambulancière et rejoint l’Union patriotique des femmes belges. Elle crée, avec son mari, différentes œuvres chargées d’aider la population et organise un service postal clandestin entre les soldats et leurs parents. Arrêtée en 1916, elle est déportée à Siegburg. Après la guerre, elle s’engage dans l’action féministe avec le but d’obtenir le droit de vote pour les femmes. Membre du Conseil National des Femmes Belges dès 1921, elle en devient la présidente en 1935.

Découvrez-la sur DONum, à travers un ouvrage : 1920-1950 : trente ans d'activité féminine : extraits de discours et de messages (1950)

Pour en savoir plus : C. Duchène, « Marthe Boël », in Biographie Nationale, t. 34, Bruxelles, Académie Royale des Sciences, des Lettres et des Beaux Arts, 1968, col.87-93.